Pauvre guitare

Pauvre guitare à gueule de bois,

Ne me regarde pas comme ça.

Je t’inventerai d’autres mélodies,

On s’aimera encore, c’est promis,

Mais ne me fais pas cette tête-là,

Ne me joue pas n’importe quoi.

Je sais, tu rêves de Narcisso,

Notre complicité sonne faux,

Mais je fais ce que je peux, moi,

Et je n’ai ni le cœur, ni la foi.

Il me faudrait du chanvre indien

Et de l’encens, je serais bien,

Je te ferais de longues phrases...

Je ferais danser au bal des lazes,

Mais je n’ai plus de souvenirs,

Je n’ai personne de qui partir.

Dans mes rêves, c’est pas pareil,

Je vois les choses de la veille,

Mais relevées de belles couleurs.

Je vois les morts sans avoir peur,

Il faut dire qu’ils vivent bien,

Dans mes rêves, tout se passe bien.

En passant, un clin d’œil  à papa.

Il m’appelle mais je ne réponds pas.

T’en fais pas, je te rejoindrai un jour

Et je te raconterai mon parcours,

Et nous en rirons ensemble,

Nous en pleurerons ensemble.

Puis il s’éloigne, un verre à la main,

Il va trinquer avec ses copains,

Tous ceux que je n’ai pas connus.

Je me retrouve seul, comme nu.

Une femme me dit que je suis grand,

Qu’il me faut partir maintenant.

Dis, ça ne va pas ? Regarde-moi,

Tous mes efforts ne parviennent pas

A me hisser aussi haut que ce bonheur-là,

Il est bien plus grand que moi.

Vous êtes si belle et moi si gris,

J’en ai le cœur endolori,

Mais ne partez pas, restez ici.

Je parle encore, mais elle s’enfuit.

Musique légendaire des plaines du sommeil,

Je vois Alice au pays des merveilles,

Elle tripote un lapin de chiffon de grenier,

Elle l’écartèle, le déchire, le jette au panier,

Pourquoi doit-elle toujours m’abandonner ?

Soudain, une vente, dans un grand marché,

Qui veut de moi ? Faites des offres,

Ma peau est de la plus belle étoffe,

Mauvaises herbes et broussailles n’y passent pas.

Approchez, qui donc voudra de moi ?

Un mauvais musicien, ça vous intéresse ?

Mais je repense à toi et je te caresse,

Ne me regarde donc pas comme ça,

Pauvre guitare à gueule de bois...

Ouvrez le ban! Le banc du jour